Les thérapies brèves et l’hypnose sont par excellence des thérapies d’alliance. Pas étonnant de fait que dans le traitement de la dépression, elles soient des alliés de choix pour permettre à un patient « en panne » dans sa vie de pouvoir à nouveau avancer. Dominique Megglé parle de la dépression comme d’une crise du murissement. C’est un recadrage tout à fait valeureux de cette pathologie qui devient dès lors un passage, certes difficile à un moment de l’existence, mais destiné à poursuivre le cheminement de vie sur des bases nouvelles.
Le travail thérapeutique consistera en effet à accompagner le patient à franchir un cap important, en fonction de son actualité et à un stade donné de son existence. Milton Erickson, dans la littérature, nous offre une multitude de cas cliniques où il insiste sur l’importance de permettre à un individu, par le biais du travail thérapeutique, d’accéder à un nouveau cycle de vie. N’oublions pas cependant que la construction du futur chez le patient qui présente une dépression, et là est un premier paradoxe, est soit rendue impossible, soit fortement parasitée par des scénarios teintés de mésestime de soi. Bien qu’on ne puisse pas faire de généralisations, le sentiment d’impuissance est souvent majeur chez la personne dépressive.
La conjugaison des différentes approches en thérapies brèves orientées problème et solution, telle qu’enseignée chez FES, fournira un cadre thérapeutique optimal pour nos interventions thérapeutiques. L’utilisation de l’hypnose, intégrée également dans le programme de formation sur cette thématique, aura comme vertu d’ancrer dans le corps de nouvelles expériences afin de remettre du mouvement et de mobiliser une sensorialité plus désirable.
Que faire concrètement… Ratifier la souffrance, assurément. Désamorcer les tentatives de solutions qui épuisent la personne mais aussi construire un avenir porteur de sens. Marcher dans les pas du patient, parfois très lentement, est une condition première à respecter. Il s’agira de prendre le temps nécessaire pour qu’un objectif, susceptible de faire la différence, soit acté dans le cadre d’une relation thérapeutique suffisamment vivante. Soulager un symptôme quel qu’il soit, dans une visée thérapeutique très pragmatique, possède un caractère particulièrement motivant pour la personne qui consulte. Plus que jamais, il est essentiel toutefois de se souvenir que c’est la relation humaine en tout premier qui soigne et celle-ci a bien souvent besoin d’ailleurs d’être réhabilitée dans les vécus dépressifs qui abasourdissent le rapport au vivant et à l’être ensemble.
Pointer les exceptions permettra de désamorcer le vécu dépressif, en utilisant les apports de l’approche orientée solution, et en se gardant de tout optimisme hâtif susceptible de fragiliser un patient. Il conviendra d’externaliser ce vécu dépressif, en lui faisant prendre une forme, et d’autant plus lorsque le patient se sera placé dans une position identitaire quant à la dépression.
Nous veillerons à déconstruire la ou les croyances négatives qui torpillent l’estime de soi. Chaque fois que l’opportunité se présente, nous proposerons un recadrage de l’expérience dépressive, tel que présenté au début de l’article, comme un changement en « latence » pour suggérer qu’il s’agit bien d’un cap, certes difficile, et non d’une sentence.
Nous amènerons, à dose infime au départ, de la diversité et de la nouveauté. Les tâches, quand elles seront prescrites, seront en effet graduées. Il s’agira de mettre en place une action progressive dans la sécurité et en direction de l’autonomie et de permettre aux ressources du patient de retrouver de leur « force musculaire » en retissant du lien avec autrui.
Tandis que la situation tendra à se déverrouiller, nous tâcherons d’accueillir les espoirs, les projets et aspirations qui pourront dissoudre la tendance généralisatrice négative. En permanence, fidèles aux enseignements des thérapies brèves, nous prendrons appui sur les valeurs du patient en vue de glisser vers une alternative vivante et incarnée, adaptée à son contexte de vie. Alors, le patient, avec l’aide du thérapeute, saura retrouver l’élan vital nécessaire pour mobiliser ses ressources au service de nouveaux choix qui fassent sens dans son existence.